Le portage salarial est une forme d’emploi qui a connu un essor considérable ces dernières années. Cette pratique permet à des indépendants de bénéficier du statut de salarié tout en conservant leur autonomie et leur liberté d’action. Cependant, la législation encadrant le portage salarial est complexe et en constante évolution. Cet article se propose d’analyser les principales dispositions législatives et réglementaires relatives au portage salarial, afin de mieux comprendre ce cadre juridique et ses implications pour les acteurs concernés.
Le portage salarial: définition et fonctionnement
Le portage salarial est défini par l’article L. 1251-64 du Code du travail comme «un ensemble de relations contractuelles organisées entre une entreprise de portage, une personne portée et une entreprise cliente». Le principe est simple: un indépendant (la personne portée) réalise des missions pour le compte d’une entreprise cliente, en s’appuyant sur une entreprise de portage qui lui verse un salaire en contrepartie.
Cette relation tripartite implique donc la conclusion de deux contrats distincts: d’une part, un contrat commercial entre l’indépendant et l’entreprise cliente (contrat de prestation ou mission), et d’autre part, un contrat de travail entre l’indépendant et l’entreprise de portage (contrat de travail en portage salarial). Ce dernier contrat confère à l’indépendant le statut de salarié et lui permet de bénéficier des avantages sociaux liés à ce statut (protection sociale, congés payés, etc.).
Le cadre juridique du portage salarial: entre régulation et souplesse
La législation encadrant le portage salarial a connu plusieurs évolutions au fil des années, afin de s’adapter aux réalités économiques et sociales du marché du travail. L’objectif principal est de protéger les droits des personnes portées, tout en préservant la flexibilité offerte par cette forme d’emploi.
La loi n°2008-596 du 25 juin 2008, dite «loi de modernisation du marché du travail», a posé les premières bases juridiques du portage salarial en France. Elle a notamment prévu la conclusion d’un accord national interprofessionnel (ANI) pour définir les conditions d’exercice et de fonctionnement du portage salarial.
L’ordonnance n°2010-18 du 7 janvier 2010, prise en application de la loi précitée, a intégré le portage salarial dans le Code du travail et précisé les conditions requises pour exercer cette activité. Elle a également instauré un mécanisme d’agrément pour les entreprises de portage, afin de garantir leur respect des obligations légales et réglementaires.
L’ANI du 24 juin 2010, signé par les partenaires sociaux, a déterminé les règles applicables en matière de rémunération, d’indemnisation des périodes d’inactivité et de formation professionnelle pour les personnes portées. Cet accord a été étendu par arrêté du 28 octobre 2010, ce qui lui confère une valeur légale.
Les principales dispositions légales du portage salarial
Le portage salarial est soumis à un certain nombre de conditions et de règles spécifiques, notamment en matière de rémunération, de durée du travail et de responsabilité des entreprises de portage.
La rémunération: l’article L. 1251-67 du Code du travail dispose que la rémunération minimale des personnes portées doit être équivalente à 70% du salaire brut moyen des cadres (environ 2 900 € bruts mensuels), pour une activité à temps plein. L’ANI du 24 juin 2010 prévoit également le versement d’une indemnité d’apport d’affaires en cas de prospection commerciale réussie.
La durée du travail: les dispositions relatives à la durée légale du travail (35 heures hebdomadaires) s’appliquent aux personnes portées, sauf dérogation prévue par leur contrat de travail. Les heures supplémentaires sont soumises au régime légal ou conventionnel applicable dans l’entreprise de portage.
La responsabilité des entreprises de portage: l’article L. 1251-65 du Code du travail prévoit que les entreprises de portage assument l’ensemble des obligations afférentes au contrat de travail conclu avec la personne portée, notamment en matière de rémunération, de congés payés et de formation professionnelle. Elles doivent également garantir la bonne exécution des missions confiées par l’entreprise cliente, en veillant au respect des règles d’hygiène et de sécurité.
Les perspectives d’évolution du cadre juridique du portage salarial
Le développement du portage salarial et ses enjeux économiques et sociaux ont conduit les pouvoirs publics à envisager de nouvelles réformes législatives, afin d’améliorer le statut des personnes portées et de renforcer le contrôle des entreprises de portage.
Le projet de loi «Avenir professionnel», adopté en première lecture par l’Assemblée nationale en juin 2018, prévoit notamment la création d’une commission paritaire nationale du portage salarial, chargée de négocier les conditions d’emploi et de travail des personnes portées. Ce projet soulève toutefois certaines interrogations quant à son articulation avec le droit commun du travail et la protection des droits fondamentaux des travailleurs concernés.
Ainsi, si le cadre juridique du portage salarial a connu d’importantes évolutions ces dernières années, il demeure perfectible et nécessite une vigilance accrue des acteurs concernés pour garantir une meilleure protection des droits des personnes portées.